dimanche 18 janvier 2009

Saint-Paul . Remy Jobard (1)

«Les pas du plus audacieux des missionnaires …» (1)


COMMENT S’INFORMER SUR SAINT PAUL ?


S’il est parfois difficile de parler des saints vénérés par l’Eglise, même de certains disciples de Jésus dont on ne connaît guère de façon sûre que le nom, ce n’est pas le cas pour St Paul. Là, en effet, les sources abondent et le risque c’est d’être très vite débordé. Il n’est donc pas question de proposer ici une bibliographie, car se sont des milliers de livres, brochures, plaquettes et articles divers qui ont été consacrés à l’Apôtre et continuent à être publiés. Le plus simple est donc de se référer d’abord à quelques documents de base :

· En premier lieu, bien sûr, les œuvres de Paul lui-même : si les spécialistes discutent sur l'authenticité de quelques-unes des 14 épîtres canoniques qui ne seraient peut-être pas de la main même de l'apôtre tout en restant d'esprit paulinien, ces textes, très riches, forment un corpus important dans lequel on trouve une foule de renseignements sur l'auteur, sur l'époque et sur les destinataires.

· Ensuite les Actes des Apôtres : en effet ce second ouvrage de Luc faisant suite au 3ème Evangile retrace les débuts de l'Eglise et fait donc une large place à la vie et aux voyages de Paul, jusqu'à l'arrivée à Rome, comme si une étape essentielle avait été franchie lorsque l'Evangile avait atteint la capitale du monde.

· Enfin l’histoire et l’archéologie peuvent aussi être mises à contribution. En effet les voyages de Paul l'ont entraîné vers les grands ports, les carrefours, les capitales du monde méditerranéen où il a croisé des personnages importants de l'époque. Avec Paul, on est vraiment à un point de rencontre de l'univers de la Bible et des civilisations grecques et romaines, donc des grandes valeurs qui fondent notre civilisation : une raison de plus de mieux connaître l'apôtre des nations.

· J’ajouterai encore qu’ayant participé avec mon épouse à un pèlerinage sur les pas de St Paul il y a quelques années, nous avons enrichi notre mémoire de nombreux souvenirs personnels dont nous avions fait bénéficier à l’époque les auditeurs de RCF en réalisant plus de trente émissions. Nous avions trouvé aussi de précieux renseignements dans un ouvrage publié en 1990 et intitulé simplement Saint Paul. L'auteur Paul DREYFUS n'est ni un exégète ni un théologien, mais un journaliste et son livre est d'une lecture aisée. Son entreprise originale a néanmoins été encouragée par la hiérarchie et saluée par d'éminents spécialistes.
Quelques éléments permettant de cerner la forte personnalité de Saint Paul.
Pour comprendre Paul, on ne peut pas séparer l’homme de l’environnement spirituel et culturel juif qui fut le sien pendant les trente premières années de sa vie. C’est ce que nous tenterons d’abord de découvrir.

1) D’où Paul est-il originaire ?

Il répond lui-même à cette question : «suis Juif, de Tarse en Cilicie, citoyen d’une ville qui n’est pas sans renom» (Ac.21,39). La Cilicie est alors une province romaine située dans cette partie de l’Asie Mineure qui borde la Méditerranée au nord de l’île de Chypre. Tarse en est la capitale très active. Son port, bien abrité, accueille de nombreux navires tandis que, par la terre, parviennent des caravanes apportant des profondeurs de l’Asie épices et soieries. De plus, la cité est devenue un foyer de culture éclipsant Athènes et Alexandrie, toutes deux en déclin. Aujourd’hui Tarsus est une importante agglomération turque d’environ 100 000 habitants.

2) Quand Paul est-il né ?
Impossible de le savoir avec précision, mais les historiens proposent un éventail de dates possibles entre l’an 5 et l’an 10 de notre ère, ce qui explique le choix de 2008 pour célébrer le bimillénaire de la naissance de l’apôtre. L’empereur Auguste régnait alors depuis plus de 20 ans et le pays connaissait une heureuse période de paix quand naquit un petit garçon qu’on prénomma Saul ( on prononçait Shaoul): Saul signifie en hébreu «ésiré», si bien que le futur apôtre porte en fait le même nom que le saint qui évangélisera plus tard notre région et qui est le patron de notre paroisse.

3 ) Que sait-on de son milieu familial ?
Les parents du petit Saul sont des Juifs de la diaspora, c’est -à-dire des émigrés qui ont dû quitter la Palestine sous la pression de divers conquérants et ont trouvé asile dans les différentes régions qui bordent la Méditerranée. Ces gens-là sont nombreux et l’écrivain grec Strabon, au Ier siècle avant J.C, écrit par exemple, laissant percer (déjà!) une pointe d’antisémitisme : «race a pénétré dans toutes les cités et il est difficile de trouver, dans le monde entier, un seul endroit qui ne l’ait accueillie et où elle ne soit devenue maîtresse». Sans doute la famille de Saul est-elle établie à Tarse depuis assez longtemps puisqu’elle bénéficie du droit de citoyenneté, accordé pourtant par Rome avec parcimonie. En tout cas, cette famille juive est d’excellente origine ce que ne manquera pas de rappeler Paul à plusieurs reprises avec un légitime orgueil : «suis moi-même Israëlite, de la descendance d’Abraham, de la tribu de Benjamin» (Rm 11,1) La famille est pharisienne ; Paul le proclamera devant le sanhédrin : «suis Pharisien, fils de Pharisiens» (Ac.23,6). Il faut oublier la signification péjorative qui s’attache à ce nom. Les Pharisiens voulaient seulement appliquer la Loi avec le plus grand zèle pour former une communauté exemplaire.
C’est donc dans cette famille pieuse qu’a grandi le jeune Saul. Le père exerce le métier de tisserand, plus exactement il fabrique des tentes en poils de chèvre, spécialisé de Cilicie ( de là, notre mot cilice) et il initiera son fils à ce travail d’artisan.
Dans ce foyer on parle grec, langue qui est alors pour le Bassin méditerranéen ce que l'anglais est dans notre monde actuel. Sans doute parle-t-on aussi l'araméen, langue populaire de la Palestine d'alors et probablement ces citoyens romains connaissent-ils un peu de latin, mais c'est en grec qu’ont été écrites les Epîtres de Paul, comme d’ailleurs les Evangiles.

4) Première formation :
Le chef de famille a certainement, selon la tradition, enseigné lui-même les préceptes de la religion à son fils avant que, à l’âge de 5 ans, il ne fréquente l’école juive de Tarse, car depuis l’an 75 avant notre ère ( 2000 ans avant Jules Ferry ! ) la désignation d’un maître d’école est obligatoire dans chaque communauté juive. On apprend à lire et à écrire et on mémorise les 27 chapitres du 3ème livre de la Torah ( le Lévitique) parce qu’ils constituent la règle de vie de tout bon Juif.
On ne sait pas exactement quel fut le cursus scolaire de Saul à Tarse, mais tout laisse à penser qu’il a dû fréquenter aussi, dans son adolescence, un «» qui n’est pas seulement un complexe omnisports, mais le lieu où enseignent les philosophes grecs. En effet tout au long de sa vie Paul montrera qu’il maîtrise parfaitement les procédés des intellectuels grecs, l’art de discuter et de persuader.

Lorsqu’il a environ 16 ans, se situe un événement capital : sa «montée» à Jérusalem… ( à suivre)

Peut-on ébaucher un portrait physique de Paul ?

C’est là sans doute un problème mineur, mais on est frappé en constatant que les nombreuses représentations de Paul, dès les premiers siècles du christianisme, reprennent presque toujours les mêmes traits physiques : petite taille, crâne dégarni, sourcils rapprochés … Pourquoi ? Il semble bien que ces détails proviennent d’une description précise qu’on trouve dans les «de Paul et de Thècle», œuvre datant de la fin du IIème siècle, donc bien postérieure à la mort de l’Apôtre. On ne peut pas faire pleine confiance à cet ouvrage qui tient plus de la légende que de l’histoire. Mais il est possible que l’auteur ait voulu souligner le contraste entre la faiblesse de la nature humaine et la grandeur de la mission surnaturelle, un thème cher à Paul. Quoi qu’il en soit de l’apparence physique de Paul, nous avons de bonnes raisons de penser qu’il jouissait d’une constitution vigoureuse: nous le constaterons d’ailleurs en le suivant au cours de ses voyages et de ses multiples épreuves. Rémy Jobard

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