dimanche 14 septembre 2014

Homélie Croix Glorieuse – 2014 - Carmel de Saint-Maur -

Homélie Croix Glorieuse – 2014 - Carmel de Saint-Maur -
Père Maurice Boisson

Il ne nous viendrait pas à l’idée de porter autour du cou une petite guillotine, une petite chaise électrique ou tout autre instrument de mort et de souffrance. Pourtant, on aime bien porter une croix, même si on n’est pas croyant ; on en met dans nos maisons, on en rencontre le long des chemins, et, bien sûr, sur nos propres chemins de vie ; et la croix est bien un instrument de mort et de supplice, pour punir, au temps de Jésus, les esclaves, les brigands, les résistants au pouvoir de l’occupant.

De plus, en ce dimanche, nous faisons la fête à cette croix et nous l’appelons « glorieuse », signe de gloire et d’admiration.

Comment un tel outil de torture peut-il être louable ? Qu’est-ce que je pouvais dire récemment à Chantal et à Bernard, pleurant de grande souffrance devant la mort de leur petit, et disant : « Comment qu’on va pouvoir supporter cette croix ? » Et j’entends aussi, il y a peu, Denis, la quarantaine, venant de perdre son épouse après une maladie qui avait été un véritable chemin de croix. Denis me disait : « C’est la foi, c’est l’espérance, qui nous ont fait tenir. Nous passons par la croix, mais elle débouche sur la résurrection et la vie. » Et il y a eu ce beau mot qui résume tout : « C’est l’expérience de l’amour. »

On est au cœur de la fête de ce dimanche et surtout au cœur de la réalité humaine qui nous atteint le plus : la souffrance, la vie, l’amour, les croix, les résurrections…

Dans toutes ces expériences de vie où on ne peut pas se payer de mots et de beaux discours, mais seulement regarder la Croix du Christ, comme les Hébreux, dans la première lecture (Nombres 21,4b-9), regardaient le serpent d’airain pour être guéris des morsures du serpent – regarder d’un regard d’accueil la Croix du Christ, lui montrant et lui présentant nos morsures de la vie.

On ne peut souvent qu’accueillir et prêter l’oreille, au plus profond de nous-mêmes, à un murmure d’une source, à un secret de tendresse bienfaisant. La Croix du Christ instrument de souffrance devient cet arbre mort dans lequel la vie reprend et sur lequel quelques pousses apparaissent, parfois timidement, mais sûrement ; comme dans la peine, l’inquiétude, l’espérance, l’intuition et la rencontre de Marie Madeleine un beau matin de dimanche après un vendredi de souffrance. Le tombeau est vide. Il ne s’agit pas de nous complaire dans la souffrance, ni de nous trouver bien sur nos croix, ni d’en rajouter, ni d’en chercher : elles arrivent bien. Il s’agit de combattre toutes sortes de mal, de souffrance.

Vous croyez, vous, en un Dieu qui a créé ces humains, ces enfants, pour qu’ils soient malheureux, pour qu’ils souffrent pour mériter, comme on dit, une place dans sa maison ? Dieu n’a pas donné raison à la souffrance ni à la Croix, mais il a donné raison à l’Amour, par la croix du Christ, cette croix que le don de la vie du Christ rend glorieuse.

« Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime » (Jean 15,13).

Il nous aime jusqu’au bout. C’est en donnant raison et le dernier mot à l’amour que Dieu transforme la Croix du Christ - nos croix - en instruments de victoire. Nos croix restent des croix ; la vie germe à l’intérieur parce que le Christ a injecté en ce bois la sève de l’amour et de la vie.

« Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils. Celui qui croit aura la vie. » C’est l’Evangile (Jean 3,13-17).

La Croix Glorieuse est le témoin qu’il n’y a pas de Vendredi Saint sans que l’aube de Pâques ne se lève.

Pour rester dans l’esprit de la fête du Carmel d’hier (nous avons fêté le 400e anniversaire de la fondation de premier Carmel de Franche-Comté à Dole), laissons-nous habiter par l’expérience de Saint Jean de la Croix : « J’ai vu ta Croix, ô Christ, j’y ai lu le chant de ton amour. »

Que les croix que nous portons sur nous ou qui ornent notre environnement, nous rappellent l’Absolu Amour vers lequel nous devons tendre.

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