dimanche 14 décembre 2014

Homélie 3e dimanche de l’Avent - 2014 -

Homélie 3e dimanche de l’Avent - 2014 -
Carmel de Saint-Maur - Père Maurice Boisson
Isaïe 61,1-2a.10-11 ; Cantique Luc 1 ; 1 Thessaloniciens 5,16-24 ;  Jean 1,6-8.19-28

Vous vous souvenez peut-être de ce refrain de Charles Trénet : « Y’a d’la joie ! Y’a d’la joie ! Partout y’a d’la joie… »
Aujourd’hui, on entend un autre refrain : « C’est pas la joie ! » - devant les événements, les situations, les difficultés du temps, « C’est pas la joie ! »

Et voilà que ce troisième dimanche de l’Avent, comme un rayon de soleil dans la grisaille, nous chante un hymne à la joie – le mot est employé dix fois dans cette Messe !

Dès la première phrase d’entrée : « Soyez dans la joie ! Soyez toujours dans la joie… »
La prière d’ouverture demande au Seigneur de « diriger notre joie vers la joie du grand événement de notre salut. »

La première lecture et le psaume expriment la joie de Dieu qui sera chantée par Marie dans le Magnificat pour l’action et la présence de Dieu dans nos vies.
Saint Paul, dans la deuxième lecture, nous remet ça : « Soyez toujours dans la joie » (Thessaloniciens 5,16).

Et Jean-Baptiste, dans l’Evangile, laisse transparaître – discrètement, c’est vrai – sa joie de préparer la route au Seigneur et surtout d’annoncer sa présence : « Au milieu de vous se tient celui dont vous n’avez pas idée » (Jean 1,26).
Le Préface et la Bénédiction finale nous invitent à repartir dans la joie : « Qu’il rende joyeuse notre espérance ! »

Vraiment, «  y’a d’la joie ! » – au moins dans les mots de la liturgie, (on appelait ce dimanche Gaudete – réjouissez-vous, et le prêtre revêtait une chasuble dont la couleur tirait sur le rose, moins triste que le violet).
Nous, qu’en est-il ? Cette joie est-elle aussi en nous, dans nos cœurs ? Ou bien n’est-elle que paroles, loin de la réalité de nos vies ?
Serions-nous une fois de plus des naïfs, chantant des Alléluias sur leur petit nuage, loin des difficultés du moment, des épreuves, des soucis ?

La joie que nous donne le Christ « Je vous dis cela pour que vous ayez en vous ma joie » (Jean 15,11), c’est comme un secret dans le cœur, au fond de nous-mêmes. Elle n’est ni exubérance ni démonstration bruyante : elle est durable, elle rayonne sans bruit ; elle se manifeste dans ce que nous sommes, sur un visage, dans un regard, un geste, un sourire, une parole, une manière de vivre et d’être avec les autres ; elle vient d’un secret intérieur dont l’origine est une présence, une promesse, «  une confiance secrète, même au milieu des pires soucis » - écrit le Pape François (Joie de l’Evangile 6).

Cette joie ne gomme pas les épreuves ni les difficultés de la vie - qui peuvent être causes de tristesse ou de découragement, on le comprend bien –, elle permet de les traverser mieux, comme la petite source qui se fraye des passages dans les fissures de la terre et des rochers et qui arrive au jour, dans la fraîcheur et le petit bruit harmonieux de la liberté venue des profondeurs et les ayant traversées.

La joie est libératrice, libérante, parce qu’elle traverse en le purifiant ce qui vient la contredire – c’est souvent ce qui empoisonne la vie ensemble.

Cette attitude de paix intérieure est sans cesse à demander et à accueillir : « Ne laisse pas les ténèbres me parler »… ni m’envahir de tristesse.

Saint François d’Assise, aux prises aux plus grandes difficultés, dans le rejet, l’abandon par ses frères, l’isolement, écrit : « Contre toutes les machinations, les ruses de l’ennemi, ma meilleure défense, c’est encore l’esprit de joie. » C’est vrai, c’est l’écho à la promesse du Christ : « Votre joie, personne ne vous la ravira » (Jean 16,22).

Dans la deuxième lecture, à l’appel : « Soyez toujours dans la joie », Saint Paul ajoute : « Priez sans relâche » (1 Thessaloniciens 5,17) ; c’est aussi le message de cette troisième semaine de l’Avent. C’est le même message : la prière, qui se fait écoute, nous branche sur le murmure de la source du secret intérieur qui nous parle doucement au cœur : oui, « y’a d’la joie »… parce que « au milieu de vous se tient celui dont vous n’avez pas idée » ! Il est là, il vient.

Dans ce haut lieu, on pourrait poursuivre cette méditation par l’appel à réaliser la première attente du Pape François pour cette année de la vie consacrée : « Que soit toujours vrai ce que j’ai dit un jour : « Là où il y a des religieux et religieuses, il y a de la joie. »

Bien sûr, il n’y a pas que là, on le sent peut-être plus.

Que ce temps soit l’occasion de partager - même sans paroles, par ce que nous sommes - ce secret de la joie intérieure qui nous habite.

« Que notre joie demeure. »

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