lundi 22 février 2016

Homélie 2e Dimanche de Carême, 21 février 2016

Homélie 2e Dimanche de Carême, 21 février 2016
Carmel de Saint-Maur – P Maurice Boisson

Textes : Gn 15, 5-12.17-18 ; Ph 3,17-4,1 ; Lc 28b-36 (la Transfiguration)
Quand Didier est venu me dire : Ça y est, je suis guéri, je vais pouvoir reprendre le boulot et la vie normale, son visage était rayonnant, autre, il était transfiguré.

Sabine, je ne la reconnaissais pas, elle avait beaucoup changé, le visage aux traits défigurés par la douleur du décès brutal de son mari.

Plus récemment, je vois arriver Régis et Chantal, que j’avais mariés. Le visage tout rayonnant de joie intérieure. Ils venaient m’annoncer la naissance d’un bébé, attendu après quelques années d’incertitude.

Oui. On est tous témoins de ce genre d’expériences intérieures, fortes de douleur ou de bonheur, on les a peut-être vécues nous-mêmes, elles transforment, on n’est plus les mêmes, ça se voit sur sa figure, sa façon d’être, transfigurés, transformés, à l’intérieur, et ça transparaît à l’extérieur.

Ces moments forts sont toujours porteurs de messages. Il y a toujours une voix qui murmure en nous, un appel, un merci, une prière, écoutez-le.

Sur la montagne, Jésus prie, son visage devient autre, son vêtement, d’une blancheur éblouissante ; ses amis de la première heure, Pierre, Jacques, et Jean, qui l’accompagnent, le voient autre, l’espace d’un moment. C’est bien Lui, traversé par la lumière, rejoint par les deux grands personnages qui ont fait aussi l’expérience de Dieu sur une montagne… Moïse, sur le mont Sinaï, Elie, sur le mont Horeb.

Il se passe en Jésus quelque chose qui le touche profondément dans son être : la reconnaissance de paternité de son vrai Père : « Celui-ci, c’est mon Fils, je l’ai choisi, écoutez-le », faites-lui confiance quels que soient les évènements qui vont arriver, je ne laisserai pas tomber mon Fils, je lui donnerai raison sur les forces du mal auxquelles lui et vous, allez être affrontés. Ces paroles de tendre confiance indiquent le terme après les passages douloureux. Ce rayonnement lumineux de Jésus dont ses trois amis sont témoins, annonce la lumière de Pâques, après le passage des ténèbres de la souffrance.

Ce visage, transfiguré, sera dans quelques jours visage défiguré, il deviendra visage ressuscité.

En annonçant sa montée à Jérusalem, sa Passion quelque temps auparavant, ses amis n’avaient rien compris. Il n’a pas voulu les laisser sans espérance, sans aide, sans appui, pour traverser ces passages difficiles : le procès, la mort, de Jésus, mais aussi leur propre reniement et abandon…

Cet évènement de Jésus transfiguré, au visage autre, rayonnant, lumineux, rejoint le plus profond de nos vies, de nos expériences, de la vie du monde.

Il rejoint nos propres passages, nos traversées, par ciel lumineux ou nuageux, par la lumière et la nuée, les nuages noirs qui font peur comme à Pierre et aux autres pour les moments où comme Pierre on a envie de dire : on est bien, restons-y, plantons la tente.

Ce visage de Jésus, ce sont nos visages, les visages de nos frères et sœurs… en humanité ou en religion : visages transfigurés, par ce qui arrive de bonheur ou de douleur, de morsures ou de caresses de la vie, visages défigurés, mais visages ressuscités au bout du compte-, depuis le soir de l’amour donné, il n’y aura plus de ténèbres du Vendredi, sans lumière du matin de Pâques. C’est à nous, fils, et filles du Père, qu’est confiée la lumière pour la traversée, les passages, sur le chemin quotidien et ordinaire de nos vies.

De la ténèbre du Mal qui défigure, nous devons faire la lumière qui transfigure… alors nous pourrons dire comme Pierre, « Seigneur, il est bon que nous soyons ici », parce que se devinent déjà en ébauche et comme en filigrane, nos visages et le visage du monde, visages ressuscités.

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